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Les 40 ans du Puy du Fou – Un Puyfolais nous fait pénétrer dans l’antre du Seigneur

Les 40 ans du Puy du Fou – Un Puyfolais nous fait pénétrer dans l’antre du Seigneur

 





Avant-Propos: Alain Blanchard est un enfant du bocage, il a vécu tout près du Puy du Fou. Il était au Collège à Mortagne-sur-Sèvre, et a suivi ses années de Lycée à St-Gabriel (St-Laurent-sur-Sèvre). Tous ses copains ont intégré très jeunes le Puy du Fou pour participer bénévolement à la Cinéscénie et Alain Blanchard a suivi le même chemin à l’âge de 16 ans, à l’été 1997. Le chemin des Puyfolais qui mène vers une certaine fierté: pas celle d’appartenir à une caste mais, bien plus, celle de mettre en valeur l’histoire de la Vendée et de rehisser son drapeau, une manière de se rattacher à ses racines. Il y a désormais environ 3300 Puyfolais. A l’époque, il y a 20 ans, c’était déjà un succès avec 2500 Puyfolais répartis sur 5 « villages ». Alain Blanchard faisait partie du Groupe 93 de la Pêcherie.
Il a vécu de l’intérieur et pendant des années ce que vivent Les Puyfolais du bocage.
Le Reporter sablais

 

L’anneau de Jeanne d’Arc revient en France – Le Puy du Fou © Photo: Le Reporter sablais

 

 

Le Reporter sablais: Quel était le rythme de la Cinéscénie et comment étaient choisis les acteurs?
Alain Blanchard: Comme aujourd’hui, les séances avaient lieu les vendredis et samedis soir entre juin et septembre, il y avait donc entre 25 et 30 séances (NDLR: au début le nombre de séances était plus limité; en 1978, le spectacle Son et Lumière s’est déroulé du 16 juin au 5 août 1978). Il y a une rotation entre les acteurs, environ 2200 sur les 3300 étant en situation lors d’un des spectacles et chacun des Puyfolais doit être disponible pour au moins la moitié des spectacles.

LRS: Expliquez-nous comment vous faites, alors que vous êtes des bénévoles, pour arriver à fournir un spectacle de qualité et qui ne doit souffrir d’aucune médiocrité?
AB: D’abord il y a des séances de travail régulières durant l’année auxquelles on participe, le plus souvent possible. Même si on habite au Pays des Olonnes – comme ce fut mon cas ensuite – on fait le trajet presque toutes les semaines. Ensuite, avant les spectacles, il y a une multitude de répétitions dès le mois de janvier. Trois répétitions générales sont mises en scène avant la traditionnelle « Première. »
Il y a une constance chez Les Puyfolais, c’est la volonté d’être pro dans l’esprit. Que l’on soit acteur, cavalier, technicien etc… et, bien que non-professionnel, on cherche par tous les moyens à apporter toute la qualité nécessaire dans nos réalisations.

LRS: Comment sont choisis les acteurs principaux?
AB: En fonction de leurs qualités, bien sûr, des circonstances aussi. Il y a des rôles pour lesquels on se sent plus à l’aise, ce qui influe sur les choix. Quand j’ai démarré comme acteur, j’étais inséré dans la foule mais il m’est arrivé ensuite d’être l’un des acteurs, seul sur scène. On sent alors tous ces yeux qui sont portés sur soi, mais il faut en faire fi et jouer le plus justement possible. Pour les acteurs « pédestre » (NDLR: donc non cavaliers) , il y a des talents qui se découvrent au fil des répétitions, y compris au sein des gens du bocage. C’est d’ailleurs l’un des intérêts de ce spectacle, permettre à des gens du bocage de se découvrir, de se construire grâce à la participation à un spectacle artistique et culturel.

LRS: Pourquoi y a-t-il tant de jeunes à vouloir devenir « Puyfolais »?
AB: Beaucoup viennent pour acquérir une expérience. Le Puy du Fou est une chance pour des jeunes du bocage, ils y apprennent des métiers culturels ou techniques, par exemple des métiers liés au spectacle, à la régie technique. Ça leur permet de « s’élever » en matière de compétences. Laurent Albert qui est actuellement le directeur général, s’est d’abord spécialisé sur la photo et a commencé à travailler à la régie; il est devenu une référence en matière de lumière pour la mise en valeur des bâtiments.
De 2500 les Puyfolais sont désormais 3300 car il y a des besoins pour les nouveaux rôles créés dans les spectacles.

LRS: Des candidatures sont-elles refusées? Faut-il être parrainé?
AB: Aujourd’hui il y a des demandes qui ne peuvent être satisfaites, d’abord car on ne peut pas mettre toujours davantage de monde sur le site pour des raisons de place et d’organisation. Mais il ne faut pas vouloir être Puyfolais juste pour un certain « apparat » , pour son image personnelle. Ça doit être un véritable engagement et il serait dommageable de laisser participer des gens qui n’ont pas cet esprit. D’après mes souvenirs, il y a 20 ans, les demandes de 3 à 400 personnes n’étaient déjà pas acceptées. Oui, il faut un parrainage, mais il existait déjà il y a 20 ans.

LRS: Y a-t-il une priorité pour les habitants des Epesses pour devenir Puyfolais?
AB: Non. D’ailleurs, il y a maintenant pas mal de gens du littoral qui participent au Puy du Fou et pas seulement ceux du bocage.
Il y a 30 ans, les Vendéens du bocage et ceux du littoral ne se parlaient pas beaucoup car il y avait une certaine incompréhension entre eux, un esprit différent, parfois des concurrences ou des jalousies. Mais surtout une façon d’être différente qui les séparaient fortement. Cette frontière s’est atténuée avec le Puy du Fou et aussi grâce au Vendée Globe.

LRS: Et à vous, qu’est-ce que ça a apporté?
AB: Dès l’âge de 16 ans, ça m’a permis d’avoir une occupation l’été et en même temps d’intégrer la sphère artistique. Ça peut aussi créer des opportunités de rencontres et permettre d’assister aux prestations de grands artistes. J’avais à cette époque été remarqué pour ma voix, et comme les spectacles nécessitaient des enregistrements de doublures de voix, j’avais eu le plaisir de lire un texte devant Alain Delon. Cet épisode est un bon souvenir, et c’est le Puy du Fou qui m’a permis de réaliser cette petite prestation devant l’acteur mythique que fut Alain Delon.
La vie c’est souvent ça, des rencontres, des opportunités (dans le bon sens du terme) permettant de rentrer dans des dynamiques.

LRS: Et ça vous a servi ensuite?
AB: Ensuite je suis parti à Paris où j’ai fait du droit à Assas. J’ai eu l’occasion de faire quelques voix off et des figurations lorsque j’étais à Paris, mais sans aller beaucoup plus loin.

LRS: C’était comment la Cinéscénie il y a 20 ans? Le Puy du Fou a 40 ans, donc ce n’était pas les débuts, vous étiez à mi-chemin de son parcours.
AB: Les Puyfolais étaient répartis en 5 « villages » qui étaient alors de simples cabanes. Sur le plan technique et des équipements, tout a bien changé. A l’époque, il y avait des paysans qui venaient participer en venant à travers champs sur leurs chevaux. Désormais, le Puy du Fou a ses propres chevaux.

LRS: Quelle est l’évolution des structures, du confort, de la qualité?
AB: Le confort est aujourd’hui supérieur en raison des installations qui sont progressivement sorties de terre. Il y a une époque lointaine où les repas proposés ont pu ne pas être totalement appréciés, mais au fil des décennies tout cela s’est nettement amélioré avec le prestataire actuel, Sodexho, qui doit assurer notamment la restauration pour 1200 salariés.
Concernant la qualité du Parc, l’idée est que celui-ci ne comprenne pas des attractions identiques à celles que l’on trouve dans les parcs à thème, la volonté étant de faire vivre autre chose aux visiteurs, de les faire vibrer. Les restaurants et les décors sont aussi là pour ça, mais l’assiette n’est qu’un complément.

LRS: Il y a désormais plusieurs hôtels au sein du Puy du Fou. Avez-vous eu l’occasion de les essayer?
AB: Non, j’habitais à 5mn.

LRS: Et sur le contenu, le contenu historique, qu’en pensez-vous?
AB: Il s’agit d’un récit, la remontée dans le temps d’un territoire qui raconte son histoire. En tant que Puyfolais, nous étions fiers, et moi-même bien sûr, de raconter l’histoire de nos familles devant 14.000 spectateurs. Et puis il y a aussi la volonté de rétablir une vérité sur les guerres de Vendée. Un des intérêts du Puy du Fou, c’est bien sûr de parler des guerres de Vendée et à travers ce récit des racines de la Vendée; c’est important de parler de ces hommes qui se sont battus pour conserver leur liberté.

Groupe de Puyfolais avant un spectacle – 3ème à partir de la g. Alain Blanchard © Photo: Collection personnelle Alain Blanchard

LRS: On retrouve la plume experte de Philippe de Villiers dans l’histoire des guerres de Vendée. Et quoi de plus?
AB: Philippe de Villiers a poussé cette vérité à son paroxisme, ce qui a permis de la faire admettre par les historiens.

LRS: Le Puy du Fou a-t-il permis de changer l’image que certains pouvaient avoir de la Vendée?
AB: Il y a 40 ans, il semble que l’image de la Vendée n’était pas très flatteuse (NDLR: sur le plan économique). Aujourd’hui, on peut dire que la Vendée a vécu un véritable miracle économique. Certes, le terreau était favorable avec des entrepreneurs dynamiques mais le Puy du Fou a servi cette dynamique économique, a permis d’inciter des entrepreneurs à venir s’installer en Vendée. Sans chauvinisme, on peut affirmer que le Puy du Fou est une marque reconnue pour son excellence et que ça influe fortement sur l’attractivité du territoire.
Le Puy du Fou sera toujours aux Epesses, devant le château. C’est une histoire indémodable qui est un des éléments incontournables du succès du Puy du Fou, et un moteur pour la Vendée.

LRS: On sait que tous les acteurs et intervenants pour la Cinéscénie sont bénévoles. Mais on vit dans un monde très mercantile. N’y a-t-il pas des gens qui tentent, insidieusement, de changer les choses?
AB: La force et la faiblesse de la Cinéscénie, c’est le bénévolat. Même lorsque des stars interviennent, le principe est le même: le bénévolat. Non, à ma connaissance, personne ne demande ni n’a jamais demandé à être payé. Je crois profondément que si on rentrait dans cette logique, ce serait le début de la fin…! Il est nécessaire, à mon sens, que ce soit un don total de la part des Puyfolais.
C’est un véritable engagement – même si ce mot peut paraître suspect – mais tous ceux qui se sont pris au jeu ont bien compris qu’il s’agissait d’une aventure commune. Et, quand on voit le résultat, tous les prix d’excellence obtenus, la fierté qu’en tirent tous les acteurs, je peux vous assurer que personne ne se pose la question d’un choix entre le bénévolat et des indemnités. Ceux qui viennent participer au Puy du Fou le font parce qu’ils en ont envie, pas pour d’autres raisons.

Le Puyfolais Alain Blanchard et toute sa famille © Photo: Collection personnelle Alain Blanchard

LRS: Avez-vous une image forte qui reste ancrée dans votre mémoire?
AB: Mes enfants ont suivi mon engagement et je peux vous assurer que l’on est particulièrement heureux lorsqu’on se retrouve à jouer sur la scène de la Cinéscénie avec ses enfants. C’est une image forte que de voir ses enfants se construire, eux aussi, sur la scène, c’est une belle opportunité pour eux et ça leur servira comme référence. Et pour moi, c’est un cadeau inestimable.

LRS: Avez-vous eu d’autres activités au sein du Puy du Fou?
AB: J’ai donc été acteur, puyfolais, au sein du « Groupe 93 de la Pêcherie » , j’ai été responsable de ce groupe durant 8 ans et également membre du Conseil d’administration. Il y a une volonté de Philippe de Villiers d’intégrer un grand nombre de personnes au Conseil d’administration afin de les faire participer aux prises de décision, et donc les responsables de « cabanes » étaient associés au CA qui comprenait alors 60 à 70 personnes.

LRS: Pour atteindre l’excellence et obtenir tous ces prix internationaux, j’imagine que, comme on dit, le diable est dans les détails. Comment se déroule le processus pour mener à l’efficience?
AB: Il y a un peu moins d’une trentaine de spectacles et ce sont Philippe de Villiers, le fondateur, son fils Nicolas qui est Président du Puy du Fou et Laurent Tard, directeur artistique adjoint, chargé des danses et de la chorégraphie, qui analysent tous les spectacles. Ils font ensuite des comptes-rendus par « Village » , c’est-à-dire par groupe d’acteurs, et apportent leur touche pour les correctifs nécessaires: là, c’est le fiancé qui s’est mal déplacé, là le ton n’était pas approprié etc… Tout le monde est très impliqué, et chacun a le souci d’améliorer chaque chose, chaque élément.

LRS: Avez-vous une image sociologique relative à la Cinéscénie?
AB: Le bocage est désormais bien connu pour ses entreprises familiales comprenant 10 à 50 salariés dirigées par des gens avec un fort esprit d’entreprise. Pendant la Cinéscénie et lors des répétitions qui la précédaient, on a pu voir un patron qui était parfois aux ordres d’un de ses ouvriers alors responsable de scène. On ne dira pas que la composition de la scène gommait totalement les échelons sociaux, mais il se produisait une sorte de magie faisant que tout le monde se mettait à sa place (artistique) et jouait son rôle, quelle que soit en dehors sa fonction professionnelle.
On a pu voir aussi récemment la députée Véronique Besse s’occupait de l’accueil de la Presse.
Il fut drôle aussi un jour de voir un acteur en costume de Républicain, quasi tétanisé car il jouait un personnage face à Philippe de Villiers lui-même, habillé en Vendéen.

LRS: On voit que Philippe de Villiers est toujours très impliqué au Puy du Fou. A l’époque, il y a 20 ans, quelles étaient ses activités au Puy du Fou?
AB: Il lui est arrivé d’être acteur à la Cinéscénie, parfois pour remplacer quelqu’un, mais son rôle essentiel c’était la mise en scène. Il avait des compétences qui pouvaient être très diversifiées. On l’a ainsi vu former des cracheurs de feu! Il y avait toujours une étincelle dans sa façon de faire. Une de ses forces était de pouvoir passer, dans un temps très court, d’une idée qu’il avait à sa réalisation. Au-delà de ça, c’est un personnage très charismatique.

LRS: Philippe de Villiers est marqué politiquement. Est-ce que ça posait des problèmes par rapport à certains acteurs de la Cinéscénie? J’imagine que dans le bocage il y a aussi des gens de gauche…
AB: Je pourrais donner l’exemple de plein d’acteurs de la Cinéscénie qui n’ont jamais voté à droite. Tous ont fait fi de cet aspect là de Philippe de Villiers, le Puy du Fou ne devait pas en pâtir et, quitter, abandonner le Puy du Fou sous le prétexte que le fondateur n’avait pas les mêmes idées politiques qu’eux aurait été un crève coeur. Le Puy du Fou a toujours été plus fort que ces antagonismes politiques. Certains journalistes ont bien essayé de titiller les Puyfolais sur cet aspect, mais pour ces derniers ce n’était pas un sujet, ou en tout cas cela ne devait pas en être un, tous faisaient abstraction de cela pour le bien du Puy du Fou.

LRS: Les Guerres de Vendée, la royauté, la jeune République, les Vendéens, le martyre, le génocide, on est malgré tout dans la politique?
AB: Philippe de Villiers a juste mis la France et la Vendée au coeur de ces spectacles, mais c’est essentiellement historique et cela ne relève pas d’une volonté de faire de la politique politicienne. Ce sont des tableaux historiques comme ça se fait aussi à Chambord. Même si, bien sûr, les guerres de Vendée relèvent d’actes politiques, Philippe de Villiers a eu l’intelligence de ne pas chercher à relayer au sein du Puy du Fou ses visions politiques contemporaines.
Au travers du spectacle de la Cinéscénie, on retrouve le drame total que fut le génocide des Vendéens en 1793, et le souhait a été de rendre hommage à leur mémoire, y compris pour moi-même puisque ma famille est issue du milieu paysan du bocage depuis des siècles.

LRS: Quand on participe à la Cinéscénie à l’âge de 16 ans, est-ce qu’il s’y passe des choses comme celles que connaissent les ados l’été sur la plage?
AB: Il nous est arrivé souvent de traîner dans les cabanes d’acteurs jusqu’au milieu de la nuit, à la fin de la saison. Il y a eu des moments magiques. Le spectacle d’une durée de 1h30 réunit 17.000 spectateurs avec des effets sonores importants.  Ensuite, il y a un sentiment de reflux, de calme reposant. On se retrouve entre Puyfolais. Certains traînent, cherchent à partager un bon moment en engageant la conversation sur le spectacle ou sur les rumeurs du moment, ou éclatent de rire lorsqu’on leur apprend qu’un des acteurs a perdu son pantalon durant l’une des scènes. Parfois, ces moments de partage, de communion se déroulent autour d’un feu de camp.
Ensuite, bien plus tard au milieu de la nuit, le silence devient total; au loin on aperçoit les ruines, l’étang se reflète tel un miroir, on entend les grenouilles et les chauves-souris. C’est le moment le plus magique. On atteint alors une sorte de moment d’éternité en plein coeur du Puy du Fou. Des souvenirs inoubliables.

Découvrez ci-dessous les débuts du Puy du Fou en vidéo

 

 

Philippe Brossard-Lotz
Le Reporter sablais

(déjà diffusé le 22 mai 2017 à l’occasion des 40 ans du Puy du Fou).

 





2 commentaires

  1. Je vais au Puy du fou depuis 2008, nous y revenons à 20 personnes, du 18 au 21 août, nous avons hâte, c’est toujours un émerveillement

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