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Zone rouge : Les Sables d’Olonne lance un recours contre l’Etat

Mardi 6 septembre 2016 – Geoffroy de Baynast, adjoint au Maire, annonce que la Ville des Sables d’Olonne va déposer un recours au Tribunal administratif contre l’arrêté du Préfet de Vendée – n°16-DDTM85-82 – qui porte « approbation du Plan de Prévention des Risques naturels prévisibles Littoraux (PPRL) du Pays d’Olonne » signé le 30 mars 2016, et cela afin de défendre les intérêts des Sablais. A ses côtés, Antoine Plateaux, avocat de la Ville, précise que le recours sera déposé en fin de semaine. Est visée dans cette procédure la mise en « Zone Rouge » de la totalité du Remblai des Sables d’Olonne!

Xynthia va donc continuer à faire des vagues, mais dans les prétoires. Revenons à la genèse de ce conflit.
Après Xynthia, l’Etat met en place un Plan Submersions Rapides (PSR) afin de « maîtriser l’urbanisation et l’adaptation du bâti sur les territoires menacés. » Puis il engage – au travers du Préfet –  la couverture progressive des communes du littoral vendéen au moyen d’un Plan de Prévention des Risques Littoraux (PPRL). Ainsi par arrêté du 6 juillet 2012, le préfet de Vendée a ainsi prescrit l’établissement des PPRL suivants :
• « Pays d’Olonne » sur le territoire des communes de Brem sur Mer, l’Ile d’Olonne, Olonne sur Mer, Les Sables d’Olonne et le Château d’Olonne
• « Pays Talmondais » sur le territoire des communes de Talmont Saint Hilaire, Jard sur Mer et Saint Vincent sur Jard.

L’élaboration de ces PPRL fait l’objet d’une concertation avec les collectivités locales et l’ensemble des acteurs locaux participant à la prévention des risques au sein d’un comité technique et d’un comité de pilotage présidé par le préfet de la Vendée. Parallèlement, une enquête publique relative au projet d’approbation du Plan PPRL « Pays d’Olonne » sur les communes de Brem-sur-Mer, Olonne-sur-Mer, L’Île d’Olonne, Les Sables d’Olonne et Le Château d’Olonne est lancée. Elle s’est déroulée du 28 décembre 2015 au 29 janvier 2016.

Les conclusions motivées de la Commission d’Enquête furent les suivantes : élaborer un PPRL dans ce secteur est pertinent, les aléas sont bien définis, et les cartes précises et pertinentes, les enjeux sont bien repérés, le zonage est cohérent, le règlement est proportionné, adapté aux risques, l’étendue de la bande de chocs mécaniques dans le secteur du Bd de Lattre de Tassigny sur la commune du Château d’Olonne doit être revue et s’arrêter à une cote inférieure, et la bande de chocs mécaniques de la rue du Bargeouri est bien dimensionnée et son règlement adapté.

Plus spécifiquement et concernant le Remblai des Sables d’Olonne :
– « Le projet de PPRL prévoit une bande de 50m d’aléa de chocs mécaniques, classé en zone rouge dans le règlement, qui s’étend de la pointe nord du Remblai (environ 6-7 m NGF) jusqu’au sud, sur la commune de Château d’Olonne à une cote de 11-12 m. »
Or, lors de l’enquête le classement uniforme du Remblai en zone rouge concrétisé par la bande de 50m de chocs mécaniques fut contesté, notamment par la Mairie des Sables d’Olonne ! S’il était reconnu que certaines zones du Remblai, plus proches du trait de côte (crête du muret) telles que la promenade, les ouvrages de défense contre la mer et la portion de la promenade Clemenceau située entre la rue Guynemer et la rue des Deux-Phares (Les Roches noires) sont effectivement plus susceptibles d’être confrontées à l’impact des vagues lors de tempêtes, d’autres secteurs du Remblai plus éloignés du trait de côte, orientés sud ou sud-ouest ou en deuxième rang ne peuvent être exposés de la même façon à cet aléa. (…) Il n’y a jamais eu de dommages structuraux aux bâtiments suite à une tempête et ceci est confirmé par le RETEX de la tempête Xynthia sur le Remblai où seuls des dégâts sur la voirie et les différents ouvrages de protection ont été recensés.
Le Remblai présente une grande variété de bâtis face à la mer : immeubles, maisons individuelles, bâtiments publics, piscine, commerces dont la distance par rapport au trait de côte s’étend de 5 à 40m. D’autres immeubles se trouvent en recul du premier rang et à une cote supérieure ou en deuxième rang et qui ne sauraient être autant impactés par l’aléa chocs mécaniques que certains immeubles de premier rang. Il en est de même pour les étages des immeubles.

La Commission d’enquête indiquait alors qu’il semblait difficile d’appliquer un règlement « zone rouge » qui émane de la Circulaire 2011 à toutes les côtes françaises, sans en faire une adaptation locale lorsque cela se justifie.
Ce que permet cette Circulaire dans son chapitre 4 qui évoque des dérogations : « Si la sécurité des personnes reste un impératif, ces principes généraux ont vocation à être déclinés à l’échelle du territoire en tenant compte dans la mesure du possible des contraintes et des stratégies de développement de la collectivité. »
La commission d’enquête estimait alors qu’une étude plus détaillée et adaptée aux situations très diverses rencontrées tout au long du Remblai est nécessaire afin de faire preuve de bon sens. Sous l’effet de chocs mécaniques, un immeuble de 1er rang peut être fragilisé, mais il paraît peu plausible d’en envisager sa destruction complète. Sauf concomitance entre un phénomène marin majeur et un phénomène sismique de très haut degré.

Si la Commission d’enquête a bien émis un avis favorable sur le projet de PPRL, elle l’a malgré tout assorti de nombreuses réserves. Ainsi, elle a estimé qu’il semblait « difficilement justifiable de maintenir une bande uniforme de 50m sans un complément de données » et a donc demandé, dans l’attente de résultats de cette étude complémentaire, l’application de mesures de ‘bon sens’ telles que :
– l’exclusion des immeubles de deuxième rang (ou en recul et de cote supérieure) de la bande de chocs mécaniques.
– ET l’application de la zone rouge modulée en fonction de l’étage de l’immeuble.
En conclusion, elle a estimé nécessaire d’effectuer l’étude de vulnérabilité des différents bâtiments secteur par secteur et en faisant un règlement différentié en fonction :
– de la vulnérabilité identifiée dans l’étude et,
– de la nature des locaux : logements en sous-sols / Rez-de-chaussée de commerces / Rez-de-chaussée de logements / Appartements dans les étages.

La Commission d’enquête a également précisé que le règlement devait décrire des moyens de mitigation adaptés à chaque cas avec des mesures de sécurité et de sureté par des moyens appropriés et qu’il fallait pouvoir revenir sur certains points qui régissent le bâti, par exemple l’inconstructibilité, qui doit pouvoir être modulée en fonction des secteurs, les prescriptions concernant l’aménagement des intérieurs devant pouvoir être modulées en fonction du secteur et de l’étage.

Dans un courrier du Préfet à la Commission d’enquête, en date du 25 septembre 2015, il était indiqué que « les fortes incertitudes scientifiques et la variété des méthodes de calcul rendent inapplicable, dans le court terme, une approche quantitative des forces générées par les chocs mécaniques susceptibles de s’exercer sur le bâti en vue de les traduire dans le règlement d’un PPRI. Des études complémentaires passant notamment par la mobilisation de données plus fines sur la caractérisation du littoral seraient nécessaires… »

Or, parmi toutes ces réserves émises par la Commission d’enquête, « aucune n’a été retenue » déclarent Geoffroy de Baynast et Antoine Plateaux.
L’arrêté préfectoral précise dans ses « Vu » préliminaires que les avis de la Chambre d’Agriculture, de la CCI de Vendée et de la Ville des Sables d’Olonne sont défavorables. L’avis de la Ville d’Olonne-sur-Mer est circontancié. Celui de la Ville du Château d’Olonne et de la CCO Olonnes est favorable avec réserves, et il est émis avec observations par la Ville de l’Île d’Olonne.
Dans ses « considérant » préliminaires, le même arrêté précise que « les avis reçus et les observations déposées lors de l’enquête publique justifient des adaptations limitées ne remettant pas en question l’économie générale du projet de plan de prévention des risques littoraux soumis à enquête publique. »

« Pourquoi toute cette enquête et ces réunions publiques pour de prétendues concertations si aucune des réserves avancées n’est prise en compte » s’étonne un habitant du Remblai. « Rien n’a été pris en compte, il s’agit d’un simple parapluie administratif pour s’affranchir de possibles responsabilités » s’énerve un autre.
Quant à Geoffroy de Baynast, il déclare que l’Etat a simplement mis en pratique « un principe de précaution à outrance » et s’étonne que seule la ville des Sables d’Olonne soit impactée ainsi.
L’avocat de la ville, Antoine Plateaux, déclare pour sa part que « le principe de précaution concerné est en totale contradiction avec ce qu’a élaboré la Commission d’enquête composés d’experts nommés par le Tribunal » ajoutant « Les études ont été insuffisantes, le travail est à compléter notamment sur la bande des 50m. »

Des commerçants très inquiets pour leur activité commerciale
Des raisons suffisantes pour lancer un recours au Tribunal administratif. « Mais nous avons auparavant tenter un recours gracieux » précise Geoffroy de Baynast « cependant les services de l’Etat n’ont même pas répondu dans le délai imparti de 2 mois. »
Ce recours est lancé pour préserver les intérêts de la Ville des Sables d’Olonne et de ses habitants. C’est que la mise en « Zone Rouge » risque d’avoir des répercussions considérables. Des propriétaires d’hôtels et restaurants du Remblai estiment que ce sera très pénalisant : impossibilité de faire de nouveaux travaux ou de créer de nouvelles chambres. Et ils questionnent, très inquiets : « En cas de destruction d’un bâtiment qu’en sera-t-il des possibilités de nouvelle construction ? Si un sous-sol est noyé, vont-ils considérer que le bâtiment est fragilisé et mettre en péril mon activité commerciale? » L’un d’entre eux s’étonne, alors que les mises en zone rouge devraient être uniforme sur tout le littoral, que celle-ci soit jusqu’à 25m à St-Gilles-Croix-de-Vie contre 50m pour Les Sables d’Olonne. Même étonnement pour les activités économiques qui n’ont pas été prises en compte pour différencier les zones.

Des risques pour l’activité touristique ?
Certains habitants craignent une explosion des primes d’assurances voire une baisse de la valeur de leur patrimoine. Pour d’autres, le danger serait une influence négative sur le tourisme aux Sables d’Olonne dès que ce passage en Zone rouge et ses conséquences seront bien connues et diffusées : « Il y aura de possibles conséquences sur l’économie locale » regrette Geoffroy de Baynast.
Beaucoup de questions donc et des incertitudes : « Tout cela n’est pas très clair en matière de répercussions et les services de l’Etat n’apportent pas d’éléments précis ni même d’explications sur les choix de cette bande de 50m et le détail des études menées » ajoutent Geoffroy de Baynast et Antoine Plateaux.
« C’est un Cabinet d’études qui a été choisi pour effectuer tous les PPRL du littoral » précise un représentant de la Ville. Dans l’assistance, parmi les habitants, l’un deux vitupère en estimant qu’il ne s’agit « que d’ingénieurs qui ont modélisé un territoire avec des projections non justifiées sans même être venu sur place et qui ne connaissent pas du tout la ville des Sables d’Olonne et son historique en matière d’attaques de la mer. » Un autre rappelle qu’il n’y a jamais eu de dégâts graves sur Les Sables d’Olonne même durant Xynthia. Un dernier prétend que pour fixer cette Zone rouge ont été pris comme référence les zones inondables ce qui n’a rien à voir avec les chocs mécaniques d’une tempête ! Le PPRL prévoit d’ailleurs des zones à l’arrière du port, vers l’Aubraie ou loin derrière le cinéma.

Le recours n’est pas suspensif !
Le recours va prendre du temps, au moins 2 ans sans compter les appels, et surtout il n’est pas suspensif. Ce qui veut dire que le « diagnostic de vulnérabilité obligatoire devra être fait, et ensuite les travaux nécessaires déterminés par ce diagnostic devront être effectués dans les 5 ans. »
Inquiétude supplémentaire pour les propriétaires, le coût de ces travaux peut monter jusqu’à 10% de la valeur de leurs biens!
Alors certes, ce sont les zones les plus exposées qui auront les diagnostics les plus délicats, mais cela donne déjà des sueurs froides à plus d’un habitant. Ecouter le bruit de la mer risque de devenir très coûteux!
Le recours sera donc déposé en fin de semaine. Argument essentiel de la Ville des Sables d’Olonne : l’Etat a appliqué un principe de précaution mais n’apporte aucun élément concret sur l’existence de risques de submersion.
Philippe Brossard-Lotz
Le Reporter sablais

 

Le Préfet de Vendée, Jean-Benoît Albertini
Le Préfet de Vendée, Jean-Benoît Albertini

5 QUESTIONS AU PRÉFET DE VENDÉE, JEAN-BENOÎT ALBERTINI
concernant la Zone rouge du Remblai des Sables d’Olonne (Interview du 31 août 2016 à Noirmoutier)

Le Reporter sablais : Dans le cadre de l’avancement des travaux du Plan Submersions Rapides (PSR) vous mettez souvent en avant la prise en compte désormais par les collectivités et les populations de « la culture du risque ». Il n’empêche, il y a quand même des cas de contestations, notamment pour la Zone rouge du Remblai des Sables d’Olonne.
Jean-Benoît Albertini, préfet de Vendée : J’ai entendu certaines inquiétudes légitimes, mais cela ne m’a pas semblé un état d’esprit de l’ensemble de la population.
Le Reporter sablais : D’après les informations en notre possession, la Ville des Sables d’Olonne va lancer un recours contre le PPRL du Pays des Olonnes.
Jean-Benoît Albertini, préfet de Vendée : Nous avons répondu du mieux possible à toutes les questions sur ce sujet. Le résultat de ce contentieux répondra aussi à ces interrogations.
Le Reporter sablais : Est-ce que toutes les études ont été faites, ce qui est le plus contesté est la profondeur de la Zone rouge, une bande de 50m qui paraît à beaucoup comme excessive.
Jean-Benoît Albertini, préfet de Vendée : Un travail d’expertise a été effectué ainsi qu’une concertation avec les élus et la population. Nous sommes allés aussi loin que possible dans cette concertation.
Le Reporter sablais : Certains habitants s’inquiètent des montants de travaux susceptibles d’être obligatoire, jusqu’à 10% de la valeur de leurs biens.
Jean-Benoît Albertini, préfet de Vendée : Je comprends bien, mais cela est malgré tout inférieur aux coûts engendrés s’il fallait tout reconstruire. Des mesures doivent être prises et elles sont identiques sur l’ensemble du littoral. En cas de reconstruction les matériaux devront désormais pouvoir résister aux chocs, par exemple pour les baies vitrées des restaurants ou bars qui font face à la mer et qui peuvent recevoir des galets lors de fortes tempêtes. Mais je le répète la même réglementation s’applique sur l’ensemble du littoral.
Le Reporter sablais : La culture du risque ne peut-elle s’accompagner d’adaptations ?
Jean-Benoît Albertini, préfet de Vendée : La culture du risque, c’est général et ça ne peut pas se refuser quand il s’agit de territoires particuliers. Mais nous serons dans l’attente du résultat du Tribunal.
Philippe Brossard-Lotz
Le Reporter sablais 

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