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Les Sables-d’Olonne Vendée. Port de commerce: quel choix pour l’avenir de la Porte-écluse ?

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Economie et prospective: Les Sables d’Olonne au chevet de la Porte-Ecluse

La semaine dernière a eu lieu une importante réunion entre les représentants du département de la Vendée et de la Ville des Sables d’Olonne, et les différents acteurs concernés par le Port de commerce des Sables d’Olonne.
A l’ordre du jour, l’avenir de la Porte-Ecluse du bassin à flot (Port de Commerce).

Un peu d’histoire

La construction du bassin à flot, sur l’Ile de La Cabaude, date des années 1870. C’est toujours le seul existant en Vendée. C’est ainsi que se développa le commerce de pétrole et de houille (charbon).
Bien plus tard s’installèrent la Cavac – en 1937 avec ses silos à grains – pour l’exportation de céréales d’une des principales régions céréalières (maïs, blé), une grand Glacière pour l’approvisionnement des marins-pêcheurs, et enfin PRB – en 1999 avec deux silos pour le transfert de ciment.

Le bassin à flot aujourd’hui
Il est d’une surface de 4,2 hectares. Il est entouré de 550 mètres de quais et comporte 6 postes d’accostage à quai ainsi qu’un 7ème, hors bassin et donc soumis à la marée.

Les activités actuelles du Port de commerce
Le Port de Commerce est géré par la Chambre de Commerce (CCI) via une concession accordée par le département de la Vendée.
Le trafic est actuellement d’environ 990.000 tonnes par an et concerne essentiellement:
– le terminal sablier (représente la moitié du trafic en tonnage); il ne décharge pas dans le bassin à flot mais face à la capitainerie de Port Olona;
– la Cavac pour les chargements de céréales;
-le terminal cimentier (avec PRB);
– Pajarola & Cie pour l’avitaillement de l’île d’Yeu via le navire Casam IV (transport de 550 tonnes);
– le transfert d’engrais et de divers métaux.

Rotations 2020
Les rotation ont été en 2020 de 460 navires dont 128 cargos, 194 sabliers et 136 rotations Casam.
On comptabilise 450 mouvements sur les deux ports de commerce: Les Sables d’Olonne et l’Ile d’Yeu pour 990.000 tonnes dont 65% en entrées et 35% en sorties.

Les différents acteurs du Port de commerce
le Pilote de la Loire (le lamanage* et le remorquage), le courtier en marchandises Delaroche Lebon, l’agence maritime-courtier-consignataire Pierre Lambot, la Sogam (manutention et dédouanement de marchandises), la Cavac, PRB, les Ateliers de réparations de bateaux Lefebvre, Atlantique Réparations navales, la Chaudronnerie Forge Marine Pépin (CFMP), Electronique du Littoral, Atlantique Scaphandre (travaux sous-marins), Picard peinture, Ocea (construction navale, yachts de luxe), Privilège Marine (yachts de luxe, trimaran).
La plupart sont regroupés au sein du Groupement des Usagers du Port.
(*llamanage: assistance à l’amarrage, désamorçage, départ, changement de quai).

L’élévateur à bateaux
Il est situé sur la Cabaude, et est à cheval entre le Port de commerce et le Port de pêche. Il mesure 28 mètres de long, 20 mètres de large et 20 mètres de haut.
Et son rôle est large puisqu’il peut soulever jusqu’à 500 tonnes et concerne des navires jusqu’à 48 mètres de long et 12 mètres de large au maximum. C’est le plus puissant à l’Ouest après celui de Lorient. Il est basé sur un terre-plein de 12.000 m2, qui a été triplé afin de pouvoir stationner 15 navires.

 

Porte-Ecluse fermée
Porte-Ecluse ouverte © Photo: CCI

 

La Porte-écluse
Maintenant que l’environnement est dressé, revenons au coeur du dossier, la porte du bassin à flot appelée « Porte-Ecluse ». Il s’agit d’une porte du « type segment », manœuvrée à l’aide d’un système de ballasts qui sont intégrés à sa structure.
C’est le Groupement des Usagers du Port qui a obtenu en 1964 l’installation de cette porte-écluse.
A l’époque il s’agissait d’une porte à la conception peu ordinaire car elle ne s’ouvre pas de manière traditionnelle; elle descend puis s’enfonce grâce à des ballasts qui se remplissent d’eau, puis elle bascule grâce à des vérins hydrauliques et s’engouffre au fond de l’eau dans un radier.
Pour la faire remonter, des compresseurs envoient de l’air pour chasser l’eau ce qui lui permet de reprendre sa place.
Cette porte mesure 17 mètres de large et pèse 140 tonnes.

Porte-Ecluse avec ses vérins
© Photo: ISM

 

La problématique
Sa largeur de 17 mètres empêche des cargos plus importants d’entrer dans le bassin à flot, ce qui limite l’expansion de ce port situé entre ceux de Saint-Nazaire et de La Rochelle. En effet, seuls peuvent entrer dans le sas ceux qui font moins de 110 mètres de longueur et moins de 16,50 mètres de largeur.
Et des cargos pouvant entrer avec des tirants d’eau de 5 mètres lors des marées hautes (généralement la porte-écluse est ouverte deux heures avant la plein-mer et est refermée deux heures après celle-ci).
Ce n’est que dans certains cas de forts coefficients avec des marées supérieures à 95 que des cargos de 4 à 4500 tonnes pourront entrer lors des tirants d’eau de 6 à 6,50 mètres. Les limitations entraînent lors des grands coefficients de marées un trafic très important.

 

Alain Leboeuf et Yannick Moreau

 

 

Réunion avec les acteurs du Port de commerce
Il a été rappelé que lors de l’instauration de la loi NOTRe, le département de la Vendée a tenu à conserver sa compétence globale des ports – qu’il considère comme un atout unique en terme économique sur la façade Atlantique – alors que d’autres départements ont préféré la transférer pour faire des économies.
Lors de cette réunion, le maire Yannick Moreau et le chargé des infrastructures du département, Alain Leboeuf, ont rappelé qu’un révision obligatoire devait avoir lieu tous les dix ans. La dernière a eu lieu en 2011, entraînant un arrêt total de l’activité durant six semaines. Un chantier assez long et coûteux car les systèmes hydrauliques des ballasts et des vérins doivent subir une révision totale.
La prochaine est donc normalement prévue début 2022 et c’est pourquoi le département a mis les bouchées doubles.
C’est pourquoi le département a lancé une étude – avec ISM Ingénierie – et procède à des concertations avec les usagers du port et la CCI pour décider de l’avenir de cette Porte-Ecluse et des différentes perspectives, notamment en matière de mutation énergétique pour les navires avec la solution de distribution d’hydrogène pour les flottes maritimes de demain.

Yannick Moreau: « Il s’agit de sujets stratégiques pour Les Sables d’Olonne, mais bien au-delà car l’activité de ces ports départementaux irrigue toute l’économie vendéenne.
Le département, par ses compétences propres – dont la gestion des ports – mais aussi par sa volonté au soutien de l’économie vendéenne, fait procéder à des études pour prendre les décisions les plus opérationnelles et pertinentes possible pour l’avenir de l’économie maritime des Sables d’Olonne et de la Vendée ».

 

Pilote
© Photo: Le Reporter sablais

 

 

Les discussions furent constructives
A propos du port « central » que constitue Les Sables d’Olonne, Alain Leboeuf indique que les représentants de la Cavac ont par exemple expliqué que grâce au port des Sables d’Olonne des offres spécifiques pouvaient être faites à certains clients internationaux, valorisant ainsi des produits vendéens: des blés d’hiver ou de printemps proposés par les agriculteurs.
Mais c’est la porte-écluse qui fut au centre des débats: fallait-il continuer à la rénover – tout en conservant les limitations qu’elle impose – ou envisager d’autres perspectives.
Etait-elle toujours adaptée ou constitue-t-elle un frein économique…?
Faut-il envisager son élargissement, et dans ces conditions quelles seront les répercussions économiques si la durée du chantier est de six mois à un an !??
Certains acteurs ont considéré que ce n’était pas sa largeur qui posait le plus grand problème mais le problème de la profondeur et du tirant d’eau car en cas de coefficients de marées trop faibles, les rotations ne peuvent plus être effectuées de manière régulières.
Autre problématique mise en avant par les « pilotes », le lien entre largeur du cargo et longueur. Lorsqu’ils sont plus larges, ils sont automatiquement plus long, or le cargo doit pouvoir se retourner dans le port de pêche ! Et si on peut élargir la porte, on ne peut pas en faire autant pour le bassin du port de pêche….
Le rayon de braquage limiterait la longueur des cargos à 115 mètres (NDLR: on peut donc penser que l’augmentation de la largeur serait limitée, et que c’est surtout la profondeur qui aurait un intérêt pour les rotations).

Pour comprendre la problématique du rayon de braquage, regardez cette vidéo de Le Reporter sablais:

 

 

La conclusion qu’en tire Alain Leboeuf, c’est « qu’il ne faut pas qu’on soit timide, on doit oser regarder l’avenir à la lumière de l’évolution des flottes maritimes et des besoins des clients ». A partir des résultats des études, une réflexion sera menée qui doit permettre de concilier à la fois les besoins des acteurs du port et l’avenir de la ville touristique qu’est Les Sables d’Olonne.
Des réunions sont programmées avec le Cabinet d’études. Il faut bien comprendre qu’il y a forcément des inquiétudes en raison des enjeux pour les entreprises. Ce n’est pas anodin pour elles.
C’est pourquoi, dès septembre juste après la restitution des résultats, il y aura à nouveau des échanges avec les acteurs du port de commerce. 

Les différentes orientations
Alain Leboeuf indique qu’avant d’aller plus loin, il voulait rencontrer les différents acteurs.
Les études ont commencé au début de l’année 2021 et les premiers résultats devraient être restitués en septembre, avec un arbitrage à la fin de l’année.
(Note de la Revue: L’entretien coûte très cher, la porte-écluse ne semble plus adaptée, mais toutes les options sont ouvertes, rien n’est finalisé même si l’hypothèse d’un changement peut être privilégié dans un souci de développement économique du port de commerce).
Alain Leboeuf indique qu’il a été demandé au cabinet d’étude que « toutes les hypothèses soient ouvertes » avec les avantages et les inconvénients.
Et de citer aussi bien une porte-écluse identique avec quelques travaux d’entretien, « mais on serait bien timides » ajoute-t-il; une porte-écluse plus large, une ouverture plus profonde etc..
Et même la réalisation d’une porte-écluse sur un autre emplacement ! (NDLR: mais où ? On ne voit pas beaucoup de place sur La Cabaude…). Ce qui aurait l’avantage de permettre de continuer l’activité du port, de ne pas arrêter l’activité économique.
Une chose semble sûre, c’est que l’évolution ne sera pas démesurée puisqu’il faut tenir compte, comme l’a expliqué le « pilote » une longueur en corrélation avec la largeur du bassin. Et les problématiques de sécurité doivent aussi être examinées.
Alain Leboeuf poursuit: « On est sur un investissement d’avenir donc il faut prendre la décision qui s’impose ».

Yannick Moreau reprend la parole:
« On est sur un moment crucial où le département se pose de bonnes questions avec les acteurs et la Ville et c’est très bien.
Toutes les compétences et responsabilités sont très imbriquées entre la Ville et le département sur des décisions stratégiques comme le port, Port Olona 2040, le Vendée Globe, la plaisance, l’économie maritime, les infrastructures portuaires etc… et l’année 2021 va être consacrée aux choix stratégiques sur toutes les filières: nautisme-plaisance, commerce, et pêche (avec l’extension du Centre de Marée).
Il s’agit de prendre une décision stratégique.
L’économie maritime, c’est au moins 1000 emplois aux Sables d’Olonne mais à l’échelle de la Vendée c’est beaucoup plus: le sable sablais sert à la construction vendéenne, du travail de la Cavac dépend l’agriculture vendéenne etc…
(Et sur une question à propos de la Cavac): La Cavac veut continuer à utiliser le port des Sables d’Olonne comme une porte d’entrée de son fonctionnement et de la vie de l’entreprise. Notre projet commun est de travailler à une meilleure intégration des silos dans l’environnement, et donc de devoir une plus-value pour le port. Les essais de projection durant le Vendée Globe sur les silos nous donnent envie de valoriser le site et d’en faire un atout pour les ports. Ce ne peut être qu’un projet public-privé et un moyen de valoriser notre identité maritime.

Le port est en connexion avec l’ensemble de l’économie vendéenne. Il y a des enjeux stratégiques qui dépassent largement les frontières de l’Agglo des Sables d’Olonne. »

Et pour mettre en avant l’importance d’une décision stratégique, Yannick Moreau fait alors un parallèle avec le choix qui a été fait pour l’élévateur à bateaux.
« On est à un moment de l’histoire où il faut prendre une décision. Il y a un parallèle d’ailleurs à faire avec l’élévateur à bateau. Le département de la Vendée était maître d’oeuvre et la décision a été prise entre 2005 et 2008. Pendant très longtemps en faisant des tours de table, de la concertation, on ne savait pas s’il fallait un élévateur de 300 ou de 500 tonnes. Pourtant pour le 300 tonnes, l’engin et le génie civil étaient beaucoup moins cher !
Mais finalement le département est allé jusqu’à 500 tonnes, c’était un choix compliqué car c’était au-delà du besoin de l’époque.
Le département a eu raison d’aller sur le 500 tonnes parce que ça a été un soutien à la filière de réparation navale, mais aussi de conquêtes de marchés.
Aujourd’hui, grâce à ce choix on a un port vivant, qui attire des navires en carénage dans un rayon de 150 km, et même OCEA a fait des choix de développement sur Les Sables d’Olonne alors qu’il pouvait le faire sur d’autres sites ayant moins de contraintes foncières.
On est dans cette même logique là de responsabilité, de calibrage du projet pour bien choisir le meilleur rapport qualité prix / services pour Les Sables d’Olonne et la Vendée.
Mais en même temps il faut avoir l’ambition d’avoir un projet qui soit d’avenir et qui ne fasse pas que régler les problèmes actuels mais qui permette au port sablais de se projeter dans l’avenir ».

On arrive bientôt au dénouement et au choix – à la fin de l’année – pour cette porte-écluse.
Il y a une ambiance positive, collective et constructive sur ce projet.
Il reste poser le curseur au bon endroit sur la question du tirant d’eau et de la largeur.

 

Philippe Brossard-Lotz

Le Reporter sablais

 

 




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