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Les Sables-d’Olonne Vendée. Le bâtonnier de l’Ordre des avocats s’insurge contre les atteintes aux libertés publiques

 


 

Les Sables-d’Olonne Vendée. Le bâtonnier de l’Ordre des avocats s’insurge contre les atteintes aux libertés publiques

Si Marie-Nathalie Fillonneau a été récemment désignée Bâtonnier par ses pairs sur le ressort des Sables d’Olonne, elle ne prendra ses fonctions que le 1er janvier 2022.

C’est donc un duo composé de cette dernière et de l’actuel bâtonnier, Geoffroy de Baynast, qui vient de signifier sa colère à propos de la situation actuelle concernant la justice.

C’est le bâtonnier, appuyé par plusieurs avocats présents et au nom de l’ordre des avocats des Sables d’Olonne, qui sera le plus véhément:
« Nous n’en pouvons plus des réformes permanentes et intempestives que subit l’institution judiciaire depuis une vingtaine d’années » déclare-t-il.

L’Etat multiplie les réformes mais surtout crée une instabilité des lois et de la réglementation qui sont, affirme-t-il, préjudiciable aux professions du droit mais aussi aux justiciables. Il cite alors les différentes lois Perben et bien d’autres textes encore ces dernières années.
Cette profusion de textes n’est qu’une réaction de défense d’un Etat en plein déliquescence, juge Geoffroy de Baynast, reprenant ainsi Tacite qui dans les « Annales » voit une corrélation entre l’abondance des lois et la décomposition du pouvoir.

Bien sûr on en vient rapidement aux problèmes budgétaires.
La bâtonnier considère que « si la Justice est aujourd’hui au plus mal, c’est totalement imputable à l’incurie de l’Etat qui est incapable de lui allouer les moyens (financiers) nécessaires (…) ».
Selon lui le budget moyen serait en pourcentage du PIB au niveau de celui de l’Albanie.

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Nous sommes donc allés voir les statistiques les plus fiables en la matière, celles de la CEPEJ (Commission européenne pour l’efficacité de la Justice – 8ème rapport «Systèmes judiciaires européens – Rapport d’évaluation de la CEPEJ – Cycle d’évaluation 2020 (données 2018)» dont les données traitées datent de 2018. (nous ne tiendront donc pas compte des 2,2 milliards d’€ supplémentaires consacrés à la justice sur les dernières années et des 7.400 emplois équivalent temps plein créés puisqu’ils n’ont pas encore fait l’objet de comparaison dans un rapport CPEJ).

Le tableau du CEPEJ est le suivant en € par habitant et en % du PIB (chiffres 2018)
En vert clair et chiffres du haut = € par habitant
En vert foncé et chiffres du bas = % du PIB.

€ par habitant
On voit que pour la France, le budget est d’environ 70€ par habitant et représente 0,20% du PIB.
On voit dans ce graphique une profusion de situations diverses.

Notons toutefois que quand la France était en 2018 à 70€ par habitant, la Suisse était à 200€, l’Allemagne à 131€, Monaco à 190€, le Luxembourg à 162€, l’Autriche à 125€, l’Islande à 122€ et les Pays-Bas à 120€.

On trouve des situations à peine supérieures avec l’Espagne est à 93€, la Belgique à 84 €, l’Italie à 84€, le Danemark à 83€, le Royaume-Uni à 76€.

A l’inverse, on voit quelques situations inférieures:
Le Portugal à 63€, l’Irlande à 60€, la Roumanie à 42€, la Hongrie à 58€, la Turquie à 18€, la Russie à 28€ etc…

Même si des pays comparables font aussi pâle figure, il est indéniable que la France est en bas du peloton des pays développés en matière de moyens attribués à la justice en € par habitant, et cela d’autant plus que beaucoup d’autres pays ont un PIB bien inférieur à celui de la France.
C’est pourquoi, il est intéressant de voir le % du PIB qui est consacré à la justice.

% du PIB
La France consacrait en 2018, à peine 0,20% de son PIB à la justice.
Contre 0,58% à l’Islande, 0,56% à l’Ukraine, 0,45% à la Hongrie, 0,44% à la Slovénie, 0,42% à la Roumanie.

Et contre:
Suisse 0,30%, Allemagne 0,32%, Monaco 0,26%, Luxembourg 0,18%, Autriche 0,28%, Pays-Bas 0,26%.

Et contre:
Espagne 0,36%, Belgique 0,21%, Italie 0,28%, Danemark 0,16%, Royaume-Uni 0,24%, Norvège 0,12%, Irlande 0,09%, Finlande 0,18%.

Là aussi, on voit que la France est encore en queue de peloton, largement battue par des pays dont l’économie est moins développée, et largement battue par des pays dits développés.
Seuls les pays nordiques y consacrent un % du PIB inférieur: Daanemark, Finlande, Norvège.. ainsi que l’Irlande

Bien sûr, ces chiffres ne sont pas les seuls nécessaires pour faire un « audit » du sytème judiciare car il est nécessaire d’avoir une organisation et des ressources humaines adéquates comme les greffiers et autres personnels indispensables.
La justice reste en tout cas bien trop lente.

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Etats généraux de la Justice et Atteintes aux Libertés publiques
Le bâtonnier s’insurge aussi contre Les Etats généraux de la Justice destinés à formuler de nouvelles propositions de réformes et qui devraient s’achever fin 2022.

« Ceci est d’autant plus pitoyable que ceci s’accompagne d’une restriction sans précédent des droits et libertés publiques » précise Geoffroy de Baynast.

Il en donne deux exemples:
Le Projet de Loi « Pour la confiance dans l’institution judiciaire » déposé(e) le jeudi 30 septembre 2021. Un accord a été trouvé en Commission mixte paritaire le 22 octobre 2021, et le texte doit définitivement passé en séance aujourd’hui même.
https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4604_texte-adopte-commission

Le bâtonnier considère que ce texte restreint les libertés publiques en portant atteinte au secret professionnel des avocats dans le cadre de leur activité de conseil juridique dans un certain nombre de domaines.
Il estime que cela est « totalement inacceptable et ouvre la porte à la déconstruction d’un principe démocratique fondamental. »

Le secret professionnel couvre toutes les confidences que l’avocat a pu recevoir, celles de son client mais en même temps des informations concernant des tiers. Il considère que cela conduirait à une rupture de confiance des citoyens.
Il considère cette atteinte comme dangereuse. Quid demain du secret professionnel des médecins ou de la protection des sources pour les journalistes ?

Le projet de loi permettrait donc de lever le secret professionnel, et en cas de refus conduirait à permettre des perquisitions aux bureau et domicile de l’avocat si celui-ci « a fait l’objet de manoeuvres ou actions aux fins de permettre, de façon non intentionnelle, la commission, la poursuite ou la dissimultion d’une infraction. »

D’une manière plus générale, les évolutions ou projets en cours sont considérés comme une remise en cause de certains fondements de la démocratie qui peuvent mettre en péril le 3ème pilier que constitue le pouvoir judiciaire et entraîner une déshumanisation de la justice.

Enfin, il condamne la généralisation des procédures sans audiences.
Depuis la problématique du Covid, un décret 2020-1452 du 27 novembre 2020 permet de généraliser les possibilités de procédures civiles en statuant sans audiences.
(il est également noté et déploré des ordonnances pénales mises à la signature alors qu’elles auraient été établies sans qu’il y ait eu audience publique et débat. Cela est considéré, au surplus, comme un affaiblissement de la mission du juge).

Ceci entraîne 3 problèmes majeurs pour le bâtonnier:
– un qui nous paraît peu probable mais que souligne le bâtonnier: en l’absence d’audiences, la présence des magistrats sur place n’est plus nécessaire et le contentieux pourrait donc être traité « à distance » !

Les deux autres étant particulièrement pertinents:
– le principe de l’oralité des débats et de l’accès au juge est une composante fondamentale du droit au procès équitable; il est protégé par l’article de la Convention européenne des droits de l’homme;
– enfin, l’absence d’audience supprime le principe de la publicité des audiences et prive tout un chacun de pouvoir y assister. Il en est de même pour la presse qui ne peut ni y assister ni rendre compte.
« Aucun pays démocratique dans le monde ne procède de la sorte » précise Geoffroy de Baynast.

 

Saisine du Conseil d’Etat
Le barreau des Sables d’Olonne, ceux de Bordeaux, Bergerac-Sarlat, Libourne, Pyrénées-Orientales, La Roche-sur-Yon, ont saisi le Conseil d’Etat contre cette décision considérée comme inadmissible.

 

Retraite – Les Sables d’Olonne: les avocats sablais en plein naufrage

 

 

Philippe Brossard-Lotz

Le Reporter sablais

lereportersablais@gmail.com

 

 

 

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