Vendée France Littoral. Financement du recul du Trait de côte : un calendrier qui tombe très mal (Réd. Les Sables-d’Olonne)
Financement du recul du Trait de côte : un calendrier qui tombe très mal
Photo de UNE – © Copyrights Le Reporter sablais
La tragédie de la tempête Xynthia en Vendée, en février / mars 2010, a été l’un des déclencheurs de la prise de conscience des dangers de la mer. C’était il y a 15 ans !
L’évolution climatique avec ses aléas et ses répercussions sur le niveau de la mer, sur les submersions marines, l’érosion, a accentué ces prises de conscience.
Des actions multiples ont alors été lancées, souvent dans l’urgence sous l’égide des Préfets.
Objectifs : assurer davantage la sécurité des populations dans les zones submersibles et inondables.
Pas moins de 81 actions ! (au sein du projet PSR) seront menées entre 2011 et 2016 dans les domaines suivants :
– surveillance, prévisions, diffusion Météo spécifiques, et lancements d’alertes (par le biais de sites tels que Georisques, Vigilance Crues), maîtrise de l’urbanisation, construction, adaptation du bâti, renforcement de digues, préventions des inondations (PAPI, Gemapi), prévention des risques littoraux (PPRL).
Certaines des compétences sont confiés aux collectivités, communes, agglomérations…
Dans le cadre de ces préventions, 303 communes littorales sont considérées comme des territoires comportant des risques littoraux et entraînant donc des actions de prévention spécifiques.
A titre d’exemple: le renforcement de digues, l’acquisition de maisons ou de bâtiments dans des zones dont les dangers sont irrémédiables avec, quand cela est possible, des déplacements ou des requalifications.
C’est dans ce cadre que des parlementaires, ou des élus locaux, ont créé diverses commissions visant à prendre les décisions adéquates, à informer et à peser sur les orientations gouvernementales dans un but d’intérêt public, la sécurité des populations.
On notera le Comité national du Trait de côte (CNTC) ou l’Ass. nat. des Elus des littoraux (ANEL), ou les groupes d’études parlementaires sur le Littoral.
Depuis de nombreuses années, les élus des communes littorales et les acteurs de ces associations ont orienté une partie de leurs actions vers la problématique du recul du trait de côte.
Un Rapport a été publié à l’Assemblée nationale en 2019 par Stéphane Buchou sous le titre : « Quel littoral pour demain ? Vers un nouvel aménagement des territoires côtiers adapté au changement climatique. »
Des réunions, des colloques, des rencontres ont été organisées afin d’associer le plus grand nombre, éus, parlementaires, experts, acteurs socio-économiques et surtout pour asseoir une position qui soit commune et fasse consensus.
Il en ressorti que le point essentiel portait sur « le financement de l’adaptation » aux évolutions actuelles.
Didier Mandelli, sénateur de la Vendée, et Stéphane Buchou, député de la Vendée, présidents des groupes d’études sur le Littoral, confirment que ce financement de l’adaptation est au coeur des travaux menés depuis plusieurs années au sein du CNTC.
L’objectif étant :
« En premier lieu la création d’un fonds pérenne et dédié à l’adaptation afin de garantir une réponse cohérente, équitable et à la hauteur des enjeux.
Ce fonds aurait vocation à combler les angles morts de la couverture assurantielle actuelle et à permettre aux collectivités de mettre en œuvre des politiques d’adaptation et de relocalisation. »
La volonté est donc d’obtenir du Gouvernement, sur le budget de celui-ci, une prise en charge financière régulière et pérenne, permettant de mener une action au long cours de financement d’adaptation ou de relocalisation de structures, de bâtiments, d’habitations qui, privés ou publics, trop proches du trait de côte, nécessitent impérativement un déplacement et un éloignement de la côte.
Si cette optique fait consensus parmi les élus des communes et collectivités concernés, et même au-delà semble-t-il, le premier ministre François Bayrou ne semble pas l’entendre de la même oreille.
A Saint-Nazaire, très récemment le 26 mai 2025, lors de débats au sein du Comité interministériel de la Mer (CIMER) sur le thème de « l’Adaptation des littoraux au changement climatique », François Bayrou n’a pas évoqué de financement de l’Etat, et donc n’a pas évoqué de création d’un fonds pérenne susceptible de prendre en charge les investissements nécessaires pour les adaptations et relocalisations, pour la protection des biens et des personnes.
Il entend, bien sûr, prendre en compte ces problématiques, mais il considère que ce sont les collectivités qui doivent prendre en charge les financements nécessaires.
François Bayrou :
« Il s’agira de mobiliser une partie du rendement financier généré sur le littoral, notamment par les activités saisonnières, pour contribuer à l’adaptation de la bande côtière au recul du trait de côte, dont les coûts vont fortement augmenter au cours des prochaines années”.
Plus simplement dit, les communes et collectivités devront financer ces adaptations avec leurs recettes touristiques.
A quelques jours de l’organisation de l’UNOC-3 du 9 au 13 juin 2025 à Nice, une réunion internationale de très grande envergure, sur le thème : « Accélérer l’action et mobiliser tous les acteurs pour conserver et utiliser durablement l’océan », sur un thème certes différent mais portant sur des enjeux aux répercussions similaires puisqu’il s’agira là aussi, notamment, du climat, cette annonce de François Bayrou, à mille lieux de ce qu’espéraient les communes et départements littoraux, a jeté une douche glacée…et une profonde déception.
L’ANEL, présidée par le maire des Sables-d’Olonne, Yannick Moreau, a jugé « qu’une occasion historique à la hauteur des attentes des élus des littoraux confrontés au défi climatique » a été ratée par le Premier ministre.
Et cela alors que « les communes littorales sont en première ligne face au recul du trait de côte, à l’érosion accélérée et aux submersions marines, alors que le mur d’investissement qui se profile ressemble de plus en plus à un tsunami qui va déferler sur les finances de nos collectivités littorales, le Premier ministre leur ôte tout espoir de solidarité nationale et les renvoie à des dispositifs qui ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. »
(relocalisations d’habitats, aménagements de protection, réparations après catastrophe… ).
De leur côté, les deux parlementaires précisent que « le constat, que vous connaissez, est implacable et indiscutable : l’érosion côtière et les impacts du changement climatique mettent en péril l’avenir de nos territoires, avec des conséquences humaines, économiques et environnementales majeures.
Comme l’a montré le CEREMA, si rien n’est fait, d’ici 2050, ce sont plus de 5 200 logements et plus de 1 400 locaux d’activités qui pourraient être touchés, sans compter les bâtiments publics, les infrastructures de transport, et l’ensemble du tissu local qui en dépend. »
« Vos annonces vont donc à l’encontre du principe de solidarité nationale qui fait consensus dans le travail que nous menons depuis plusieurs années de manière transpartisane au sein des deux chambres. »
« Vous demandez aux littoraux de financer seuls leur propre adaptation, alors qu’ils concernent l’ensemble des Françaises et des Français, qu’ils y vivent ou qu’ils y viennent ponctuellement.«
Un calendrier qui tombe très mal
Les demandes des collectivités d’une prise en charge financière par l’Etat tombent au plus mauvais moment.
Depuis fort longtemps les collectivités se plaignent d’un Etat qui leur transmet de plus en plus de compétences sans accompagner ces transferts des financements nécessaires. L’Etat se déleste mais ne finance pas, selon le dire de ces collectivités.
Alors, il ne fallait pas s’attendre à un miracle alors que le Gouvernement et son Première ministre François Bayrou sont confrontés à un problème inextricable, le déficit budgétaire de l’Etat, celui de la Sécurité sociale et l’avenir tout aussi délicat du financement des retraites.
En pleine réflexion pour sortir de l’ornière, le Premier ministre n’entendait pas ajouter un fardeau de plus.
Faut-il redonner les chiffres ?
Malgré des impôts qui s’élèvent désormais à 43,8% du PIB, la dette de la France est de plus de 3300 milliards d’euros, et le Premier ministre veut baisser le budget 2026 de 40 milliards.
Dans ces conditions, alors que le budget et son financement sont au coeur des débats, que la Cour des Comptes a clairement émis des avertissements, il était presque évident que le Premier ministre n’allait pas s’engager pour le financement par l’Etat de ce qui pourrait devenir, non pas un tsunami, mais un puits sans fond…
Philippe Brossard-Lotz
Le Reporter sablais
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