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Les Sables d’Olonne Vendée – Affaire des Mariages: pourquoi la procureure Carine Halley refuse la délocalisation à Olonne et au Château…




 

RAPPEL
La procureure de la République auprès du Tribunal des Sables d’Olonne s’oppose à ce que les mariages puissent être célébrés ailleurs que dans l’Hôtel de Ville officiel des Sables d’Olonne.
Auparavant apprend-on, des mariages étaient aussi célébrés à la Mairie annexe de La Chaume, et cela depuis 123 ans !
Et donc la nouvelle Municipalité des Sables d’Olonne souhaitait, à la suite de la fusion des trois communes du Pays des Olonnes, que les mariages puissent également être célébrées dans les mairies annexes des quartiers d’Olonne-sur-Mer et du Château d’Olonne.

C’est par courrier en date du 8 mars 2019 que le maire de la commune des Sables-d’Olonne a informé le procureur de la République de son intention de maintenir la célébration des mariages dans les divers sites dévolus à ces célébrations, antérieurement à la modification du périmètre de la commune intervenue en 2019, à savoir l’hôtel de ville de la commune des Sables-d’Olonne, la mairie annexe de la Chaume, l’ancienne mairie d’Olonne-sur-Mer et l’ancienne mairie du Château-d’Olonne.
Cette demande était formée à titre dérogatoire pour l’année 2019 et à titre principal pour l’année 2020.

La Procureure de la République, Carine Halley, s’est opposée le 25 avril 2019 à la célébration des mariages dans un bâtiment autre que celui de la maison commune (=mairie) pour l’année 2020.

Le recours gracieux de la commune contre cette décision, formé le 14 juin 2019 et réceptionné le 17 juin 2019 par le procureur de la République a été implicitement rejeté.

Textes législatifs et réglementaires
Avant le 18 novembre 2016, il y avait obligation de s’unir à la mairie sauf dans deux cas dérogatoires: empêchement grave ou de péril imminent de mort de l’un des futurs époux. L’officier d’Etat civil pouvait alors se rendre au domicile de l’un des conjoints.
La loi de modernisation de la justice du XXIe siècle promulguée le 18 novembre 2016 a ouvert la possibilité de célébrer un mariage dans une autre salle de la commune (par exemple en cas de salle trop petite).

L’article 49 ajoute un Art. L. 2121-30-1. dont voici la teneur:
Pour l’application de l’article 75 du code civil, le maire peut, sauf opposition du procureur de la République, affecter à la célébration de mariages tout bâtiment communal, autre que celui de la maison commune, situé sur le territoire de la commune.
« Le procureur de la République veille à ce que la décision du maire garantisse les conditions d’une célébration solennelle, publique et républicaine. Il s’assure également que les conditions relatives à la bonne tenue de l’état civil sont satisfaites.
« Les conditions d’information et d’opposition du procureur de la République sont fixées par décret. »

La loi exigeait donc que le Procureur de la République ne s’y oppose pas, ce dernier devant:
– « veiller à ce que la décision du maire garantisse les conditions d’une célébration solennelle, publique et républicaine.
– « s’assure également que les conditions relatives à la bonne tenue de l’Etat civil sont satisfaites ».

Le Décret 2017-270 du 1er mars 2017 a ajouté un article R. 2122-11 ainsi rédigé:
« Lorsque le maire envisage d’affecter à la célébration de mariages un bâtiment communal autre que la maison commune, il en informe préalablement le procureur de la République en lui transmettant son projet de décision d’affectation, accompagné de tous documents utiles permettant à ce magistrat de s’assurer que les conditions prévues à l’article L 2121-30-1 sont remplies. Le Procureur de la République dispose d’un délai de deux mois pour faire connaître au maire son opposition motivée au projet (ce délai peut être prorogé d’un mois).

Si à l’issue du délai de deux mois, ou du délai de trois mois lorsqu’il été fait application de la prorogation prévue à l’alinéa précédent, le Procureur de la République n’a pas fait connaître son opposition au projet, le maire peut prendre sa décision d’affectation. Il en transmet copie au Procureur de la République. »

C’est la Circulaire du 26 juillet 2017 qui a précisé les Conditions d’information et d’opposition du Procureur de la République dans son annexe 8.
Il y est mentionné, à propos du « Projet respectant les conditions relatives à la bonne tenue de l’Etat civil » que:
« Le bâtiment communal nouvellement affecté à la célébration de mariages devra garantir les conditions satisfaisantes de déplacement et d’intégrité des registres d’Etat civil, tel que cela est déjà pratiqué lorsque le Procureur de la République accorde l’autorisation de déplacer les registres hors la maison commune (NDLR: mairie) en raison de travaux y effectués ou en cas d’empêchement grave ou péril imminent de mort de l’un des futurs époux (article 75 du code civil).
« Ainsi, le projet de décision d’affectation devra indiquer les précautions envisagées pour éviter tous risques de perte, destruction ou altération des registres ou des feuilles mobiles destinés à établir les actes de mariage.«  »Le silence gardé par le Procureur de la République à l’issue du délai de deux mois, prorogé le cas échéant d’un mois, équivaut à une autorisation implicité accordée au maire pour que ce dernier prenne la décision d’affectation envisagée. »

 

NOUVEAU
La requête de la Ville des Sables d’Olonne a été enregistrée le 26 décembre 2019.
La Procureure de la République, Carine Halley, s’est donc opposée le 25 avril 2019 à la célébration des mariages dans un bâtiment autre que celui de la maison commune (=mairie) pour l’année 2020.

Par une décision en date du 25 avril 2019, la procureure de la République a donné son accord pour le projet de planning et d’affectation pour l’année 2019, à titre transitoire au regard du contexte de création récente de la commune nouvelle des Sables d’Olonne et afin de prendre en compte l’ancienneté du dépôt des dossiers de mariages devant être célébrés en 2019, mais s’est opposé à cette mesure au titre de l’année 2020.

Dans son mémoire en défense, le Ministre de la Justice soutient que la requête de la Ville doit être rejetée pour les motifs suivants:
– le litige est porté devant une juridiction incompétente;
– la condition d’urgence n’est pas remplie dans les circonstances de l’espèce dès lors que l’impossibilité de réorganiser la planification des mariages n’est pas établie ; il n’est nullement démontré que les conséquences d’un tel réaménagement seraient suffisamment graves et immédiates pour justifier une mesure de suspension ; enfin, la commune des Sables-d’Olonne en ne saisissant le juge des référés que le 26 décembre 2019 alors que les éléments invoqués pour justifier de l’urgence étaient connus depuis plusieurs mois a contribué à créer la situation d’urgence qu’elle invoque ;
– il n’existe aucun doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée : l’objectif poursuivi par la loi n’est pas de multiplier les salles de célébration mais de permettre la délocalisation des mariages vers un site plus adapté à l’accueil du public ; la décision vise à garantir la sécurité des registres et n’est pas entachée d’erreur manifeste d’appréciation.

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Note de la revue:
Sur le point de l’incompétence, le juge des référés a considéré que « la demande de la commune des Sables-d’Olonne ne porte pas sur un litige relatif à la fonction juridictionnelle ni à la délivrance des actes d’état civil mais à l’affectation de bâtiments à la célébration des mariages. Le litige principal auquel se rattache la mesure d’urgence demandée n’échappe pas manifestement à la compétence de la juridiction administrative. »

Argument de l’urgence: il avait peu de chances de prospérer dès lors que la décision de refus était connue dès le 25 avril 2019; la saisine « que » le 26 décembre 2019 a contribué à créer la situation d’urgence et le réaménagement de la planification des mariages ne paraissent pas suffisamment graves et immédiates pour justifier la suspension de la décision.

Deuxièmement, l’objectif de la loi n’est pas de multiplier les salles de célébration mais de permettre la délocalisation des mariages vers un site plus adapté à l’accueil du public. Si la loi et le décret sont silencieux à ce sujet, la Circulaire du 26 juillet 2017 apporte un éclairage sur lequel s’est appuyé La Procureure de la République pour justifier son refus.
Ainsi, le projet de décision d’affectation de la Ville devra comporter, notamment, les éléments suivants :

Contenu de la Circulaire: « – les motifs invoqués par le maire pour l’affectation d’une nouvelle salle des mariages hors de la maison commune (à titre illustratif: accessibilité aux personnes handicapées, exiguïté de la salle des mariages de la mairie, sécurité) ;
– l’adresse du lieu d’affectation, lequel doit nécessairement se situer sur le territoire de la commune ;
– une présentation sommaire des caractéristiques techniques du bâtiment communal (nombre de mètres carrés, équipements disponibles, présence d’un parc de stationnement pour véhicules, etc.).
Il est relevé que la notion de « bâtiment communal » s’entend nécessairement d’une construction bâtie et dépendant de la commune concernée.
Par ailleurs, pour des raisons tenant notamment à l’inopportunité de multiplier les lieux de célébration, un seul bâtiment communal pourra faire l’objet d’un tel projet de décision d’affectation. »

C’est au regard de ces éléments que la Procureure argumente dans son mémoire en défense en indiquant que « l’objectif poursuivi par la loi n’est pas de multiplier les salles de célébration mais de permettre la délocalisation des mariages vers un site plus adapté à l’accueil du public. »

On voit donc que l’adaptation et l’accueil du public, l’accessibilité, la sécurité sont des arguments à prendre en compte bien plus que la proximité ou l’attachement à un site.
On notera à ce sujet que la liste des pièces à fournir ressemble à un véritable inventaire:
– de photographies du bâtiment communal envisagé;
– de plans d’architecte du bâtiment permettant une représentation graphique et technique du lieu et de ses caractéristiques esthétiques et géométriques (ex: plans de sol, plans de masse, dessins d’architecture, plans côtés en trois dimensions précisant les aires de stationnement et les cheminements extérieurs, etc.);
– de cartes géographiques permettant d’appréhender la localisation précise du bâtiment;
– des avis de diverses commissions telles que la commission consultative départementale de sécurité et d’accessibilité, la commission de sécurité contre l’incendie et la panique, le comité technique, la commission communale ou intercommunale d’accessibilité aux personnes handicapées, la commission d’arrondissement;
– de l’attestation de conformité des règles d’accessibilité;
– de différentes notices descriptives de salubrité, d’accessibilité tant au bâtiment lui-même qu’à la salle réservée à la célébration des mariages et à toutes autres commodités devant être ouvertes à l’accueil d’un public, de sécurité incendie, etc. ;
– de rapports de fin de travaux de mise en accessibilité des bâtiments communaux…
etc…

Mais, il faut aussi noter que la Ville des Sables d’Olonne avait transmis à la Procureure un calendrier avec le principe de rotation suivant :
semaine 1 : dans la salle des mariages de l’hôtel de ville ;
semaine 2 : dans la salle de la mairie annexe d’Olonne-sur-Mer ;
semaine 3 ; dans la salle des mariages de l’hôtel de ville ;
semaine 4 : dans la salle de la mairie annexe du Château-d’Olonne ;
semaine 5 : dans la salle de la marie annexe de la Chaume ;
semaine 6 : dans la salle des mariages de l’hôtel de ville.

Le deuxième point défendu par la Procureure est de « garantir la sécurité des registres. »
Là aussi la Circulaire apporte des précisions en la matière.
Ainsi, le bâtiment communal nouvellement affecté à la célébration de mariages devra garantir les conditions satisfaisantes de déplacement et d’intégrité des registres de l’état civil, tel que cela est déjà pratiqué lorsque le procureur de la République accorde l’autorisation de déplacer les registres hors la maison commune en raison de travaux y effectués ou en cas d’empêchement grave ou de péril imminent de mort de l’un des futurs époux (article 75 du code civil). Ainsi, le projet de décision d’affectation devra indiquer les précautions envisagées pour éviter tous risques de perte, destruction ou altération des registres ou des feuillets mobiles destinés à établir les actes de mariage.

NOUVEAU

Les arguments tenus par le ministre de la Justice mentionnés ci-dessus venaient en réponse aux arguments indiqués dans la requête de la Ville des Sables d’Olonne dont voici la teneur.
Pour la Ville
« – la condition d’urgence est satisfaite dès lors que la décision attaquée empêche la célébration des mariages prévus à partir du 11 janvier 2020 dans les salles initialement affectées à cet effet par la commune ; la décision perturbe gravement le fonctionnement de l’état civil ; l’image de la commune en sera affectée en cas d’obligation de modifier les lieux de célébration pour des mariages organisés très en amont ; »

« – il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée : elle est entachée d’une erreur de droit en ce que le procureur de la République a considéré à tort que les dispositions de l’article L. 2121-30-1 du code général des collectivités territoriales ne permettaient d’affecter qu’«un seul bâtiment», en dehors de la maison commune, à la célébration des mariages ; »

« – elle est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation car la célébration des mariages dans plusieurs bâtiments ne fait courir aucun risque aux registres d’état civil ; le maintien de plusieurs bâtiments affectés aux célébrations de mariage permet de conserver les spécificités locales et historiques auxquelles les habitants sont attachés.« 

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Note de la revue: la Ville considère donc qu’il y a urgence car la célébration des mariages pour 2020 est empêchée et que le fonctionnement de l’état-civil s’en trouve gravement affectée.
Elle conteste par ailleurs l’interprétation concluant à l’affectation à un « seul » bâtiment que défend la Procureure.
Et elle considère que la célébration dans plusieurs bâtiments ne fait courir aucun risque aux registres d’état-civil.

 

Au cours de l’audience, la Ville des Sables d’Olonne a fait valoir que:
– la décision attaquée préjudicie de manière grave et immédiate au bon fonctionnement de l’état civil ; que les administrés ont parfois fait leur demande auprès des anciennes communes plus de deux ans à l’avance et qu’il est impossible de gérer dans l’urgence une modification de l’organisation et de la planification des mariages pour 2020 ; le procureur de la République ne s’est pas opposé au maintien de l’organisation pour 2019 et aurait dû, pour des raisons pratiques, prendre la même décision pour 2020 ; aucun incident n’est à déplorer en 2019, ce qui démontre l’absence de risque pour la sécurité des registres.

JUGEMENT (Extraits)
Considérant que:
(…)

6. La décision contestée est fondée sur les motifs tirés, d’une part, de ce que l’affectation d’un bâtiment communal à la célébration des mariages « ne pouvait se limiter qu’à un seul site » et, d’autre part, que la rotation hebdomadaire envisagée faisait courir un trop grand risque en terme de sécurité aux registres d’état civil.

7. Il résulte de l’instruction qu’après saisie informatique de chaque dossier de mariage, les actes de l’état civil sont imprimés sur deux feuillets mobiles lesquels sont, la veille du mariage, déplacés et entreposés dans un coffre-fort sur le site de célébration de mariage. Les deux feuillets sont sortis juste avant la célébration du mariage afin d’être signés à la fin de la cérémonie par les deux époux, les témoins et l’officier d’état-civil. Puis, les deux feuillets du registre d’état civil sont replacés dans le coffre-fort avant d’être transférés à l’hôtel de ville des Sables-d’Olonne le lundi matin afin d’être placés dans le registre des mariages.

8. La commune des Sables-d’Olonne soutient que le dispositif des feuillets mobiles est prévu par les dispositions réglementaires du décret du 6 mai 2017 et ne comporte pas de risque particulier, que les anciennes mairies des anciennes communes de Château-d’Olonne et d’Olonne-sur-Mer conservaient dans des conditions de sécurité non discutées les registres d’état civil et que la conservation sur des périodes de deux jours des feuillets mobiles ne comporte aucune difficulté. La commune fait également valoir qu’elle dispose d’un pro-logiciel de gestion de l’état-civil lui permettant d’assurer la numérisation et l’indexation de chaque acte de l’état civil et donc, d’avoir en sus de la version papier des registres de l’état civil, également une version dématérialisée de ces derniers. En défense, le ministre de la justice soutient que le fait de laisser les actes tout un week-end sans surveillance quand bien même ils seraient placés dans un coffre-fort n’est pas de nature à assurer la sécurité desdits actes, que leur transport d’un bâtiment à l’autre de la commune est de nature à accroitre le risque de perte et qu’enfin, malgré la numérisation des actes d’état civil, l’édition papier est indispensable pour permettre les signatures ainsi que la constitution des registres d’état civil que le parquet doit être en capacité de vérifier.

9. Le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation qui entacherait le motif de la décision attaquée, fondée sur la circonstance que l’organisation des célébrations de mariage sur quatre sites et selon une rotation sur six semaines faisait courir un trop grand risque en terme de sécurité aux registres d’état civil ne paraît pas propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. Il résulte de l’instruction que le procureur de la République aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif qui suffisait, à lui seul, à justifier la décision attaquée.


O R D O N N E

Article 1er : La requête de la commune des Sables-d’Olonne est rejetée.

 

RAPPEL

Célébrations en 2019
Selon le maire Yannick Moreau, 59 mariages ont été célébrés à La Chaume, au Château d’Olonne et à Olonne-sur-Mer en 2019, « et cela sans aucun incident ! Et avec l’accord de la Procureure de la République. »

Le maire estime que cette décision de la Procureure pour 2020 est « incompréhensible et inacceptable. »
« Aucun de ses prédécesseurs n’a eu l’idée de remettre en cause cette belle tradition qui n’a jamais posé aucune difficulté de sécurité du registre d’état civil ou de dignité de la cérémonie.« 

Mesures prises par la Mairie
En attendant la décision au fond, et dans l’obligation de respecter la décision de la Procureure de la République puisque le référé urgence a été rejeté, et afin d’éviter tout problème de légalité pour les mariés, les mariages officiels ne seront célébrés qu’à l’Hôtel de Ville des Sables d’Olonne. Ceux-ci pouvant être complétés par une « cérémonie » dans le quartier de leur choix à la Chaume, Olonne-sur-Mer (La Jarrie) et au Château d’Olonne.

 

Philippe Brossard-Lotz
Le Reporter sablais

lereportersablais@gmail.com

 




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