*NEWS

Histoire – Le jour où La Chaume a demandé à être réunie aux Sables d’Olonne!

Histoire – Le jour où La Chaume a demandé à être réunie aux Sables d’Olonne!




La rivalité séculaire entre La Chaume et Les Sables d’Olonne demeurera une des caractéristiques dominantes de l’histoire sablaise et chaumoise.
La Chaume avait vu, d’abord, d’un oeil de mépris l’éclosion de la bourgade nouvelle sur « une pointe de sables, au bord du havre où il n’y avait qu’une seule baraque où une mesquine femme vendait du bran-de-vin aux gens de mer étrangers. »
Puis, il avait fallu à La Chaume partager avec sa soeur cadette des Sables d’Olonne ce havre d’Olonne qui dans les siècles reculés lui appartenait entièrement et, ensuite, assister avec envie et colère au développement si rapide du commerce sablais et à l’extension d’une prospérité qui en moins de deux siècles avait relégué La Chaume au second plan.

[sociallocker]

Les oppositions religieuses
Les guerres religieuses en faisant de La Chaume une cité calviniste, tandis que Les Sables d’Olonne étaient restés catholiques, avaient encore fourni de nouveaux éléments de discorde en introduisant le fanatisme religieux dans cette rivalité d’intérêts et de suprématie. Cette rivalité portât les ardents calvinistes à démolir le château et à raser les fortifications des Sables d’Olonne. Aussi les Sablais ne pardonnèrent jamais aux Chaumois de ce qu’ils avaient été pour eux des ennemis au lieu d’alliés qu’ils auraient dû être.
Aussi La Chaume avait-elle vis-à-vis des Sables d’Olonne l’orgueilleux dédain que nourrit toute cité plusieurs fois séculaire pour les jeunes années d’une ville naissante.
La Chaume se flattait d’être aussi vieille que la terre qui la portait….; elle tirait vanité d’une existence préalable et était fière de ce passé dont l’abbaye Saint-Nicolas et le château d’Arundel étaient les preuves irréfutables, comme deux pages d’histoire écrite par la féodalité sur le sol chaumois.
A toute la gloire de ce passé, la ville des Sables d’Olonne n’avait à opposer que les espérances d’un avenir, le vent d’aventures qui animait la hardiesse de ses marins depuis les grandes découvertes maritimes.
Et, comme une fleur de dunes à la vie tenace sur la désolation de sa grêve immense, elle répondait à l’orgueil chaumois par la fierté de son laborieux enfantement.

Le Conseil d’Etat permet l’établissement d’un octroi aux Sables d’Olonne
Le 3 juin 1747, un arrêt du Conseil d’Etat permettait l’établissement d’un octroi (tarif / droits de péage) aux Sables d’Olonne, à la demande de ses habitants, la gestion étant donnée à l’adjudicataire Bruneteau.

Mais, pour éviter les fraudes, la ville fut entourée de clôtures, ce qui entraîna des difficultés entre les Chaumois et l’adjudicataire, La Chaume par son voisinage immédiat et ses relations quotidiennes avec Les Sables d’Olonne étant la première à souffrir de cette nouvelle installation.
En 1751, plusieurs habitants de La Chaume dont le curé Dupuy tentèrent de mettre en avant qu’ils étaient exempts des droits sur le sel en vertu de certains privilèges… Pour apaiser les tensions entre Chaumois et Sablais des baisses de tarifs furent consenties aux Chaumois.

Mars 1753, on apprend que les habitants de La Chaume ont demandé la réunion de leur paroisse au tarif des Sables d’Olonne
Le Comte de Blossac, intendant du Poitou, informait la Ville des Sables d’Olonne le 15 février 1753 que « les habitants de la paroisse de St-Nicolas de la Chaume s’estant pourvu devant le Conseil d’Etat pour faire tarifer leur paroisse et la réunir au tarif de cette ville » (les Sables d’Olonne), il ordonnait que le mémoire desdits habitants de La Chaume serait communiqué au maire, échevins et habitants des Sables d’Olonne « pour délibérer et concerter avec les habitants de ladite paroisse de La Chaume sur les moyens nécessaires pour ladite réunion, et pour convenir des clostures, bornes et barrières, ensemble des établissements et des bureaux convenables pour l’exercice dudit tarif. »
Le 2 mars 1753, le maire des Sables d’Olonne, le sieur Massé de la Rudelière, lieutenant de l’amirauté, donnait lecture de ce courrier lors de l’assemblée des échevins sablais.

L’émoi fut grand parmi les habitants des Sables d’Olonne notamment en raison des charges qu’allait faire peser sur les finances sablaises une réunion onéreuse.
De plus, « tout ce qui restait de haine et de rivalité jalouse entre les deux pays allait se rallumer et diviser pour quelques années encore deux populations que des intérêts similaires auraient dû rapprocher. »
C’est avec un esprit tout plein des souvenirs de la rivalité entre La Chaume et Les Sables d’Olonne, que l’assemblée générale des habitants de cette dernière, réunie le 11 mars 1753 sur ordre de l’Intendant du Poitou, statuât sur « la prétention des habitants du bourg de la Chaume » d’obtenir un tarif et de le réunir à celui des Sables d’Olonne.
Il fut observé que cette réunion du tarif allait être onéreuse pour la ville des Sables d’Olonne et que les Chaumois « devaient être contents de la diminution qui leur avait été accordée sur les droits de tarifs. »
Il était demandé que si le Conseil se déterminait à ordonner ladite réunion au préjudice des Sables d’Olonne, alors les habitants de La Chaume seraient tenus et obligés de faire clore leur bourg à leurs frais ainsi que de construire les bureaux, et d’une façon capable d’empêcher la fraude, ainsi que de payer les frais de l’arrest qui ordonnera ladite réunion.

Le 7 août 1753 le Conseil d’Etat réunit le bourg de La Chaume au tarif de la Ville des Sables d’Olonne
La Chaume riposta par une assignation, et c’est le greffier Libaudière qui défendit alors les intérêts sablais devant le sieur Dupont, délégué sur Les Sables d’Olonne de l’Intendant du Poitou. Les protestations des Sablais furent vaines.
Le 7 août 1753 le Conseil d’Etat réunit le bourg de La Chaume au tarif de la Ville des Sables d’Olonne mais les demandes de prises en charge des frais par les Chaumois furent toutefois entendues: « Les Chaumois feraient les frais d’installation de leur tarif et les enclostures qu’ils construiraient seraient efficaces pour protéger les intérêts de la Ville contre les fraudeurs. »
Mais cette clause engendra du mécontentement chez les Chaumois; d’ailleurs, le premier échevin chaumois, Pierre Boulineau, écrira à propos de La Chaume: « On la renferma d’un fossé, on y bâtit des bureaux, on y construisit une porte de ville au dépens des habitants, chose inique et illégale. »
Le 18 septembre 1753, le sieur Vernier devint adjudicataire des tarifs réunis de La Chaume et des Sables d’Olonne.

Les contraintes chaumoises contournées
« Les Chaumois avaient, naturellement, cherché à esquiver la clause onéreuse pour eux des enclostures. » Celles-ci furent si mal faites que l’adjudicataire faisait assigner le corps de ville sablais le 8 novembre 1754 pour comparution devant le délégué de l’Intendant du Poitou afin que son bail d’adjudicataire soit résilié et qu’une indemnité lui soit accordée pour les pertes que lui avait causées l’inefficacité des clôtures chaumoises face aux fraudeurs.
La ville des Sables d’Olonne notifia au syndic de La Chaume les prétentions du sieur Vernier et se crût ainsi dégagée; des tentatives d’arrangement n’aboutirent pas si bien que le 30 septembre 1755 il assigna à nouveau la Ville des Sables d’Olonne à comparaître devant le délégué de l’Intendant du Poitou.
Les Sables d’Olonne fut défendue par le procureur du roi de la maison de ville, Gaudon, qui invoqua en défense que l’adjudicataire « tenait son bail de deux communautés ayant chacune leur fondé de procuration » et que donc si les Chaumois n’avaient pas rempli leurs engagements c’était à eux seuls qu’il fallait s’en prendre.
Les Sablais considéraient au surplus que puisque les conditions des clostures n’étaient pas convenables, condition sine qua non, l’arrêt du Conseil d’Etat entraînant la réunion ne pouvait être invoqué pour alléguer que Les sables d’Olonne et La Chaume formaient une même communauté.
Cette argumentation montrait « quelle persistance acharnée les Sablais mettaient à ne pas regarder la réunion comme un fait accompli et l’empressement qu’ils mirent à profiter de cette porte de sortie qui s’entrebaillait à peine pour essayer de s’échapper de cette association imposée par l’Etat. »

Ordonnance du 10 mars 1757 nommant les officiers municipaux
Après cette affaire épineuse de la réunion, la ville eût à traverser une sorte de crise électorale qui dura deux ans et qui se termina par une ordonnance du Comte de Blossac en date du 10 mars 1757 et qui nommait d’office les nouveaux officiers municipaux des Sables d’Olonne. Dans cette liste figure pour la première fois un échevin pris dans le sein de la population chaumoise, caractérisant ainsi la réunion des deux bourgs au sein d’une même ville. En tout cas cette nomination d’un Chaumois était, dans l’esprit de l’Intendant du Poitou, destinée à lier définitivement les deux paroisses l’une à l’autre.

Pierre Boulineau

Ce premier échevin fut le sieur Pierre Boulineau (né le 12 septembre 1727) qui était Procureur du roi des traites (et fils d’un capitaine au long cours, François Boulineau).
Voulue comme une volonté d’apaisement par l’Intendant du Poitou, cette nomination fut mal accueillie par la population sablaise qui « vit dans l’immixtion de ce Chaumois dans les affaires publiques une humiliation faite à sa suprématie et la sanction d’un fait qu’elle refusait à admettre comme accompli. »

Lors de leur assemblée générale, le 20 mars 1757, les habitants des Sables d’Olonne, après lecture de l’ordonnance par le sieur Dupont, s’empressèrent de protester contre cette nomination et « contre tout ce qui pourrait être dit et prétendu dans la suite par lesdits habitants de La Chaume en cas qu’ils voulussent se prévaloir de la nomination du sieur Boulineau pour échevin, et sans que cette nomination puisse leur servir de titre pour autoriser et confirmer la réunion de leur paroisse à cette ville, voeu qu’ils n’ont pas exécuté la condition sous laquelle ladite réunion a esté ordonnée par le conseil (d’Etat). »

L’Intendant du Poitou, dans son ordonnance du 28 mars 1757, lue à l’assemblée des officiers municipaux du 15 avril 1757, trancha le différend en des termes qui n’admettaient pas de réplique:
« Quant aux protestations portées contre la réunion de la communauté de La Chaume à celle des Sables d’Olonne, et les inductions qu’on pourrait tirer par la suite, de la nomination du sieur Boulineau à la place d’échevin, cassons et annulons la délibération du 20 mars 1757 (NDLR: proclamée par les habitants des Sables d’Olonne lors de leur assemblée générale) en ce qu’elle contient à ce sujet comme tendant à entretenir la division parmi les habitants des Sables d’Olonne et de La Chaume, et attentatoire à l’autorité de l’arrest du Conseil (d’Etat) du 7 août 1753 portant réunion du bourg de La Chaume à la ville des Sables d’Olonne. (….) Ce faisant, déclarons dès à présent, nulles, toutes les protestations faites ou à faire contre la réunion de La Chaume à la ville des Sables d’Olonne par le dit arrest, deffendons de troubler sous quelques motifs que ce soit le sieur Boulineau dans ses fonctions d’échevin. »

Boulineau ne pardonna jamais le mauvais accueil fait à sa nomination d’échevin en tant que chaumois. Voici comment il raconta cet épisode trente ans plus tard:
« (…) dans l’assertion et sûr préjugé que les habitants des Sables, par leurs présomptions, leurs esprits aussi mouvants que leurs dunes ou monticules de sable, et par leur vague, cupide, égoïsme de dominer, posséder, envahir, toutes charges et prérogatives, n’admettraient aucuns citoyens de La Chaume aux offices municipaux de leur villette* (!!) (Note de Laincolle: « Comme on sent bien dans ce mot de « villette » tout le dédain chaumois pour la ville des Sables.)
D’autant qu’en l’enfance de leur moderne mairie, l’élection des officiers se faisait à la pluralité des voix
. Aussi La Chaume ne pouvant avoir qu’une cinquantaine de citoyens en lice était hors d’état de l’emporter sur plus de 5 à 600 individus qui composaient le corps des habitants de la paroisse de Notre-Dame des Sables. »

(Sources: Hugues Laincolle – 1899 – Une page d’histoire sablaise in « Revue du Bas-Poitou » 1899)
Note de Philippe Brossard-Lotz – Le Reporter sablais: l’essentiel du texte provient de l’article de Hugues Laincolle. Nous avons seulement réorganisé les paragraphes et mis en avant les interventions les plus significatives.

[/sociallocker]




Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page